Les diagrammes fréquence-volume fournissent une mesure objective de la fonction vésicale, ce qui est essentiel pour soutenir le diagnostic et le traitement corrects des problèmes urologiques
Abstract
Beaucoup de personnes connaissent des problèmes vésicaux et urinaires et les raisons de ces problèmes sont multiples. L’établissement d’un graphique de l’apport liquidien et du débit urinaire est une partie essentielle d’une évaluation de la continence et de l’urologie, qui aidera les praticiens à diagnostiquer les problèmes et à décider du traitement. Cet article décrit les différents diagrammes utilisés ; il analyse et discute également des exemples de diagrammes complétés.
Citation : Colley W (2015) Utilisation des diagrammes fréquence-volume et des journaux de miction. Nursing Times ; 111 : 5, 12-15.
Auteur : Wendy Colley OBE est un écrivain et conférencier indépendant, et ancien infirmier spécialisé en continence.
- Cet article a fait l’objet d’un examen par les pairs en double aveugle
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Introduction
Les symptômes urinaires sont courants et peuvent être dus à des affections touchant les voies urinaires ou à la suite d’une maladie affectant d’autres systèmes (par exemple, l’insuffisance cardiaque est associée à la nycturie). Un diagnostic précis est essentiel pour assurer un traitement rapide et efficace de la cause sous-jacente.
L’utilisation de tableaux pour enregistrer les heures d’émission d’urine et les volumes vidés sur une période donnée donne une mesure objective de la performance de la vessie. Les tableaux sont généralement remplis par les patients après qu’un professionnel de la santé leur ait appris à le faire. Ils fournissent des informations précieuses et sont utilisés dans les circonstances suivantes :
- Dans le cadre de l’évaluation initiale des symptômes du bas appareil urinaire (National Institute for Health and Care Excellence, 2010);
- Pour faciliter le diagnostic dans le cadre d’une évaluation de la continence (NICE, 2013);
- Comme référence pour la planification d’un régime d’entraînement de la vessie;
- Pour planifier un programme de toilette individuel;
- Pour mesurer les progrès pendant le traitement, par exemple pour une vessie hyperactive.
Les informations qui doivent être enregistrées sur le tableau seront déterminées par l’évaluateur et basées sur les capacités du patient, qui doit être capable d’uriner en toute sécurité dans un récipient, et de mesurer et enregistrer le volume de liquide.
Qu’est-ce qui est mesuré et quand
Il existe une variété de diagrammes utilisés ; cet article suit les définitions de l’International Continence Society (Abrams et al, 2002), qui reconnaissent trois principaux types d’enregistrement :
- Tableau du temps de miction : enregistre les heures de miction pendant le jour et la nuit ;
- Tableau du volume de fréquence (FVC) : enregistre les volumes mictionnels ainsi que l’heure de chaque miction, pendant le jour et la nuit ;
- Journal vésical : enregistre les heures de miction et les volumes mictionnels, les épisodes d’incontinence, l’utilisation de serviettes, d’autres informations telles que le degré d’urgence, le degré d’incontinence et la prise et le type de liquide.
Les tableaux ou les journaux doivent être remplis pendant au moins trois jours (NICE, 2013) bien qu’une période de 3 à 7 jours soit généralement utilisée ; c’est ce que recommande l’Association européenne d’urologie (Lucas et al, 2014). Il faut demander au patient d’inclure les jours de travail et de loisirs, le cas échéant, car cela peut indiquer des facteurs exacerbants. Les diagrammes doivent inclure une colonne de temps couvrant chaque période de 24 heures ; celle-ci peut être vierge pour que le patient puisse insérer les heures, mais elle est souvent étiquetée à intervalles horaires.
Un journal vésical est susceptible d’être utilisé dans le cadre d’une évaluation de la continence pour faciliter le diagnostic et informer un plan de traitement. Il s’agit d’un outil précieux, donnant une base de référence par rapport à laquelle les progrès peuvent être suivis, ce qui contribue à motiver les patients.
Préparation et instructions
Pour s’assurer que des données précises et significatives sont enregistrées, les professionnels de santé doivent aider les patients à comprendre ce qui est requis et renforcer l’importance du tableau dans le diagnostic et la gestion de leur état.
Les praticiens doivent :
- Déterminer les informations requises sur la base de l’évaluation ;
- Évaluer les capacités des patients lorsqu’ils décident de ce qu’ils doivent enregistrer et s’assurer qu’ils ne risquent pas de tomber lorsqu’ils urinent dans un récipient ;
- Confirmer que le patient comprend les mesures des fluides ;
- Présenter un tableau approprié pour enregistrer les informations.
Ils doivent dire aux patients :
- D’utiliser une carafe pour mesurer le volume d’urine et de le noter sur le tableau en fonction du temps ;
- Si les patients n’utilisent pas de carafe, de mesurer le contenu des tasses/verres qu’ils utilisent et de les noter. L’enregistrement du volume des boissons est plus facile si le volume du récipient est déjà connu. Les praticiens peuvent le faire pour les patients incapables de le faire ;
- Laver et sécher le pichet après chaque utilisation, en le conservant uniquement à cet effet ;
- Commencer l’enregistrement avec la première vidange au lever ;
- Qu’en cas d’impossibilité de mesurer les volumes d’urine – par exemple, lors de l’utilisation de toilettes publiques, ou parce qu’ils ouvrent leurs intestins en même temps – de mettre une coche dans la colonne à côté de l’heure ;
- Record the time prescribed diuretic therapy is taken, as this will increase urine output ;
- Record times of going to bed and up.
Collation des résultats
Lorsqu’un tableau est rendu, l’évaluateur doit collationner les informations pour chaque jour afin d’identifier :
- Fréquence diurne : le nombre de mictions enregistrées pendant les heures d’éveil, y compris la dernière miction avant le sommeil et la première miction après le lever du matin;
- Nocturie : le nombre de mictions enregistrées pendant une nuit de sommeil, où chaque miction a été précédée et suivie de sommeil;
- Fréquence sur 24 heures : le nombre total de mictions diurnes et d’épisodes de nycturie pendant une période de 24 heures spécifiée (Abrams et al, 2002).
Une CVF ou un journal vésical doit être utilisé pour déterminer le volume mictionnel maximal (le plus grand volume d’urine évacué au cours d’une seule miction).
Interprétation des résultats
La comparaison des résultats avec ce qui est considéré comme une fonction vésicale normale peut indiquer des zones de dysfonctionnement et être utilisée pour confirmer un diagnostic.
Il est important de se rappeler qu’il est difficile de définir une fonction vésicale « normale » ou saine (Lukacz et al, 2011) car les paramètres normaux dépendent de l’âge et du sexe, ainsi que de nombreux autres facteurs internes et externes tels que l’apport et le type de liquide.
L’International Continence Society définit la fréquence urinaire comme la plainte d’un patient qui se plaint d’uriner trop souvent au cours de la journée (Abrams et al, 2002), ce qui montre que la perception des patients de leurs symptômes doit également être prise en compte.
À titre indicatif, les paramètres « normaux » des volumes et de la fréquence des mictions chez les adultes de poids et de taille moyens sont présentés dans le tableau 1 (ci-joint).
Fréquence diurne
La fréquence normale se situe entre cinq et huit mictions par 24 heures. Un apport élevé en liquide peut augmenter la fréquence.
Nocturie
Les remontées pendant les heures de sommeil avec le besoin d’uriner une fois peuvent être considérées comme normales.
Si la nycturie est excessive, le praticien doit s’assurer que le patient se réveille en raison du désir d’uriner et non pour d’autres raisons primaires, comme la douleur, et qu’il se contente d’uriner pendant qu’il est éveillé.
La production de l’hormone antidiurétique vasopressine diminue avec l’âge, de sorte que les personnes âgées peuvent uriner plus fréquemment la nuit. La polyurie nocturne est présente lorsqu’une proportion accrue de la production d’urine sur 24 heures se produit la nuit (normalement pendant les heures où le patient est au lit). La définition précise dépend de l’âge et on considère qu’elle est présente lorsque plus de 20 % (jeunes adultes) à 33 % (plus de 65 ans) de l’urine est produite la nuit. La production nocturne d’urine exclut la dernière miction avant le sommeil mais inclut la première miction du matin (van Kerrebroeck et al, 2002). Les personnes âgées présentant une polyurie nocturne doivent être évaluées afin d’exclure des troubles cardiaques sous-jacents non diagnostiqués.
Volume maximal uriné
La capacité vésicale fonctionnelle normale chez les adultes est d’environ 300-400ml (Lukacz et al, 2011), bien que des volumes de 500-600ml soient souvent enregistrés. La vidange la plus importante a lieu généralement au lever ; au cours de la journée, la vessie est vidée à des volumes plus faibles.
Volume total évacué
Le volume total évacué dépend de nombreux facteurs, mais généralement, chez un adulte en bonne santé, il devrait être de 1 500-2 000ml. Les patients qui limitent leur consommation de liquides par crainte d’épisodes d’incontinence auront un faible débit urinaire, ce qui peut exacerber les symptômes car une urine concentrée peut à la fois augmenter l’urgence et le risque pour le patient de développer une infection urinaire.
Un faible débit urinaire qui n’est pas lié à un faible apport liquidien doit être investigué.
Apport liquidien et type
Un adulte moyen en bonne santé aura besoin d’un apport liquidien de 30ml par kg de poids corporel en 24 heures (Kobriger, 2005). En utilisant ce calcul, un adulte pesant 67kg devrait avoir un apport quotidien d’environ 2 010ml. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (2010) recommande largement que les femmes aient un apport global de 2l et les hommes de 2,5l.
La caféine est connue pour provoquer une diurèse, une fréquence et une urgence urinaires à des volumes vésicaux plus faibles (Lohsiriwat et al, 2011). Cela est gênant pour certains patients, qui peuvent bénéficier de conseils pour réduire progressivement leur consommation de boissons caféinées.
Etudes de cas
Les études de cas fictives ci-dessous illustrent différents types de fonction ou de dysfonctionnement vésical.
Fonctionnement vésical normal
Le tableau 1 (ci-joint) montre la CVF de Sarah Smith, une professionnelle de la santé de 38 ans dont le fonctionnement vésical est normal. Sur trois jours, le tableau indique :
- Fréquence des mictions : 6-7 fois en 24 heures ;
- Nocturie : jusqu’à une fois en 24 heures ;
- Volume total uriné en 24 heures : 1 900-2 000ml;
- Maximum de la miction : 500ml.
Incontinence urinaire de stress
Le tableau 2 (ci-joint) présente le journal vésical de Sue Green, 29 ans, qui aime l’exercice et le jogging. Elle a deux enfants, dont le plus jeune a neuf mois. Elle a des fuites urinaires à l’effort et ne présente ni fréquence ni urgence. Sur une seule journée, le tableau indique :
- Fréquence diurne : sept fois en 24 heures ;
- Nocturie : une fois en 24 heures ;
- Volume total uriné en 24 heures : 1 925ml;
- Vide maximale : 450ml;
- Fuite à l’effort : cinq fois en 24 heures;
- Aides à la continence : achat de ses propres protège-slips en cas de fuite;
- Apports liquidiens : 2 080ml en 24 heures.
L’apport liquidien et la fonction vésicale de Mme Green se situent dans des paramètres normaux, hormis les épisodes de fuite. Les autres examens comprenaient une analyse d’urine et un examen physique. Un diagnostic d’incontinence urinaire d’effort est alors posé et un régime de traitement consistant en des exercices individualisés des muscles du plancher pelvien commence.
Vessie hyperactive
Le tableau 3 (ci-joint) présente le journal vésical de George Emerton, un professeur de sciences de 48 ans. Il se plaint d’urgences urinaires et de fuites d’urine s’il ne parvient pas à atteindre rapidement les toilettes. À une occasion, il a dû prendre une blouse blanche dans la classe pour couvrir ses vêtements car il ne pouvait pas contrôler son urgence sur le chemin des toilettes. Comme il était incapable de mesurer ses mictions, on lui a demandé de mettre une coche dans la colonne chaque fois qu’il urinait.
Un jour de relevé sur trois jours montre :
- Fréquence diurne : 12 fois en 24 heures ;
- Nocturie : deux fois en 24 heures ;
- Volume total évacué en 24 heures : non enregistré ;
- Vide maximale : non enregistrée;
- Des fuites avec urgence sont survenues une fois en 24 heures;
- Aides à la continence : serviettes non utilisées;
- Apports liquidiens : 1 450 ml, composés de six tasses de café noir fort et d’une pinte de bière blonde.
D’après les graphiques de M. Emerton, les causes évidentes d’inquiétude sont la faible consommation de liquides et le volume de café noir fort. De plus, la bière blonde peut irriter la vessie chez certaines personnes. Après une analyse d’urine pour exclure une infection des voies urinaires et une évaluation complète de la continence, il a été conseillé à M. Emerton de réduire progressivement ses boissons caféinées, de les remplacer par des boissons non caféinées et de s’assurer que sa consommation de liquide était d’environ 2 litres par 24 heures. Il sera revu dans quatre semaines pour évaluer les progrès et les traitements complémentaires, les investigations et les orientations si nécessaire.
Cystite interstitielle
Jenny Carter, 55 ans, se plaint de fréquence urinaire, d’urgence et de fuites d’urine si elle ne peut pas atteindre rapidement les toilettes. Des douleurs abdominales basses surviennent lorsque sa vessie se remplit. Elle est par ailleurs en forme et active, mais est très fatiguée en raison d’une fréquence diurne et d’une nycturie survenant toutes les heures.
Un jour du journal vésical de trois jours montre :
- Fréquence diurne : 17 fois en 24 heures ;
- Nocturie : sept fois en 24 heures ;
- Volume total uriné en 24 heures : 1 665ml plus les fuites;
- Vide maximale : 90ml;
- Fuites avec urgence sévère : cinq fois en 24 heures;
- Aides à la continence : trois serviettes rectangulaires utilisées;
- Apports liquidiens : 2 150ml.
Le journal vésical a confirmé la gravité des symptômes de Mme Carter. L’analyse d’urine et l’examen vaginal n’ont pas montré d’anomalie, et la constipation a été exclue. Une échographie post-mictionnelle a montré que sa vessie se vidait complètement. L’orientation vers un urologue a conduit à des études urodynamiques ; celles-ci ont montré une augmentation significative de la pression de la vessie pendant le remplissage, entraînant une urgence sévère avec une pression élevée et des fuites à 90 ml. Une cystoscopie et une biopsie ont confirmé que la cystite interstitielle était la cause des symptômes. Cette condition peut être difficile à gérer et Mme Carter discute des options avec l’urologue.
Conclusion
La cartographie de la fonction vésicale et de l’apport en liquide donne des informations précieuses à l’évaluateur, mais l’importance du diagramme et la nécessité de l’exactitude doivent être expliquées au patient qui le remplit. Bien que ces tableaux ne soient qu’une partie de l’évaluation des symptômes vésicaux, aucune évaluation n’est complète sans eux. Les symptômes expliqués verbalement peuvent facilement être mal interprétés, une mesure objective de la fonction vésicale est donc essentielle pour soutenir un diagnostic et un traitement corrects.
Points clés
- La représentation graphique de la fonction vésicale et de la consommation de liquides est importante pour l’investigation des symptômes et l’établissement d’un diagnostic
- Il est important de comprendre ce qui est enregistré et pourquoi
- Les patients doivent être évalués pour s’assurer qu’ils peuvent enregistrer les informations requises
- Les patients doivent comprendre l’importance d’enregistrer les informations de manière précise
- Un tableau rempli constitue la base d’une discussion ultérieure avec l’équipe de continence/urologie
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European Food Safety Authority (2010) Scientific opinion on dietary reference values for water. EFSA Journal ; 8 : 3, 1459.
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Lohsiriwat S et al (2011) Effet de la caféine sur la fonction vésicale chez les patients présentant des symptômes de vessie hyperactive. Urology Annals ; 3 : 1, 14-18.
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National Institute for Health and Care Excellence (2013) The Management of Urinary Incontinence in Women. Londres : NICE.
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