« La plupart des gens comprennent intuitivement qu’il est préférable d’empêcher une mauvaise chose de se produire – cancer, accidents de voiture, etc. – que de faire face aux conséquences. »
Quand nous savons qu’il y a des choses que nous pouvons faire pour que les gens évitent l’itinérance, comment pouvons-nous attendre ? Mettre fin à l’absence de chez-soi signifie travailler ensemble pour s’assurer que les gens sont logés et soutenus rapidement, en toute sécurité et de manière adéquate.
Pendant plus de deux décennies, les services d’urgence sous forme de soupes populaires et de refuges, ont été la réponse dominante à l’absence de chez-soi. Bien que ces services soient importants pour aider à répondre aux besoins immédiats des personnes, cela n’a pas pour effet de réduire et de mettre fin au sans-abrisme. En fait, ces réponses peuvent piéger les gens dans l’absence de chez-soi et rendre très difficile l’obtention d’un logement sûr et sécurisé.
Au cours de la dernière décennie, les politiques et les pratiques canadiennes ont commencé à passer de la gestion de l’itinérance à la recherche de solutions. Une nouvelle direction : Un cadre pour la prévention de l’itinérance « fournit un point de départ pour une conversation nationale sur la façon de penser à répondre à l’itinérance d’une manière différente ; une conversation dans laquelle nous cherchons également à fermer la porte d’entrée ». Le cadre présente les preuves de la nécessité de prévenir l’absence de chez-soi avant qu’elle ne commence, ou de sortir rapidement les gens de l’absence de chez-soi en leur donnant un accès immédiat au logement. En fin de compte, les efforts de prévention sont essentiels pour mettre fin à l’absence de chez-soi.
Qu’est-ce que la prévention de l’absence de chez-soi ?
Les initiatives de prévention de l’absence de chez-soi visent à faire en sorte que les gens ne connaissent pas l’absence de chez-soi. Elle se compose de politiques et de stratégies qui ont un impact sur l’absence de chez-soi aux niveaux structurel et systémique, ainsi que de pratiques d’intervention précoce qui s’attaquent aux facteurs individuels et situationnels.
Le modèle de santé publique de la prévention, développé dans les années 1940 par Leavell et Clark, est un moyen utile de penser à la façon dont la prévention fonctionne. Ce modèle a été utilisé dans les soins de santé et la promotion de la santé pour prévenir le cancer, le diabète, les accidents vasculaires cérébraux et le tabagisme, pour n’en citer que quelques-uns. Plus tard, il a été adapté pour prévenir les problèmes de société, tels que la criminalité et la violence. De même, le Cadre adapte le modèle de santé publique pour guider la mise en œuvre de la prévention de l’exclusion liée au logement.
Qu’essayons-nous de prévenir ?
Il est crucial que nous comprenions les diverses causes complexes et interconnectées de l’absence de chez-soi afin de pouvoir orienter la législation, les politiques et les pratiques de manière appropriée. Les causes de l’itinérance peuvent être réparties en trois catégories :
- Les facteurs structurels, tels que les problèmes économiques et sociétaux qui affectent les opportunités, les environnements et les résultats pour les individus. Cela inclut la pauvreté, la discrimination, le manque de logements abordables et l’impact du colonialisme sur les peuples autochtones.
- Les défaillances des systèmes, lorsque les systèmes de soutien sont fournis de manière inadéquate. Les obstacles à l’accès aux systèmes publics (santé, services sociaux et soutien juridique) et les transitions ratées depuis les institutions financées par l’État (protection de l’enfance, hôpitaux et services correctionnels) sont des exemples de défaillances des systèmes.
- Facteurs individuels et relationnels, où les circonstances personnelles, telles que les crises (comme le chômage soudain ou l’incendie d’une maison), la santé mentale et la dépendance, l’insécurité du logement et la violence interpersonnelle, peuvent conduire à l’itinérance.
Qui est responsable ?
Pour que la prévention de l’itinérance soit un succès, plusieurs secteurs doivent prendre leurs responsabilités et travailler ensemble. Le secteur de l’itinérance, comme les organismes sans but lucratif, est souvent considéré comme étant le seul responsable de l’itinérance. Mais pour réellement prévenir l’itinérance, nous avons besoin d’autres systèmes pour atteindre et soutenir les gens avant qu’ils ne soient en crise. Des secteurs comme les systèmes de santé, de justice, de protection de l’enfance, de logement et d’éducation, ont tous un rôle majeur à jouer dans la stabilité du logement.
Les stratégies de prévention de l’absence de chez-soi incluent de multiples systèmes et toutes les formes de gouvernement, ainsi que la collaboration entre différents départements et institutions pour s’attaquer aux moteurs de l’absence de chez-soi.
La prévention fonctionne
La recherche sur la prévention de l’itinérance démontre que les stratégies de prévention réussissent à réduire l’itinérance. Par exemple, l’évaluation de Pawson des stratégies de prévention en Écosse a révélé que les aides à la location, telles que la médiation avec le propriétaire, les conseils en matière de logement et la médiation familiale, ont grandement contribué à la diminution des expulsions. En outre, la recherche montre l’efficacité de la planification de la sortie et des soutiens transitoires des hôpitaux de santé mentale, des établissements correctionnels et des refuges en tant que stratégies de prévention de l’absence de chez-soi.
Il existe également des recherches visant des populations particulières qui détaillent des approches préventives essentielles, comme les femmes victimes de la violence d’un partenaire intime, et des stratégies d’intervention précoce en milieu scolaire pour les jeunes, comme les Host Homes au Royaume-Uni et le Reconnect Program et le Geelong Project en Australie. Le projet Geelong est actuellement adapté au contexte canadien par le biais du projet Upstream.
Cela en vaut la peine
Plutôt que d’investir continuellement dans des solutions à court terme, il est plus logique d’aider les personnes sans abri à accéder à un logement adéquat, abordable et sûr. L’itinérance coûte à l’économie canadienne au moins 7,01 milliards de dollars par an. Pour mettre cela en perspective, selon le Blueprint to End Homelessness du Wellesley Institute, « les coûts mensuels moyens pour loger les personnes sans abri sont de 1 932 $ pour un lit dans un refuge, de 4 333 $ pour une prison provinciale ou de 10 900 $ pour un lit d’hôpital. Cela peut être comparé au coût mensuel moyen pour la ville de Toronto des suppléments de loyer (701 $) ou des logements sociaux (199,92 $) ».
La prévention de l’itinérance est rentable. La recherche montre que les mesures préventives pourraient réduire le coût public de la lutte contre l’itinérance de 56 000 $ par personne par an, à 14 924 $. À partir de là, les économies globales en termes de dépenses gouvernementales pourraient s’élever à près de 600 millions de dollars si l’on empêchait 40 000 personnes de devenir sans-abri pendant un an.
C’est un droit humain
En somme, la prévention de l’itinérance n’est pas seulement logique sur le plan financier ; un logement abordable, sûr et adéquat est aussi un droit humain. De nombreux gouvernements, dont le Canada, sont signataires de traités et de pactes internationaux qui décrivent l’accès au logement comme un droit de la personne. Par exemple, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) stipule que tous les États signataires doivent » reconnaître le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu’à une amélioration constante de ses conditions d’existence « .